À La Réunion, nous avons nout « Zembrokal Religion », c’est-à-dire, un vivre ensemble unique. Nos ancêtres ont dû apprendre à construire malgré leurs grandes différences cultuelles et même en étant sous le joug d’une religion dominante à l’époque qui était le christianisme. Nous demeurons une île de foi et de croyances diverses.
Dans l’Ouest de La Réunion, la ville du Port et de Saint-Leu sont deux exemples où toutes les religions et lieux sacrés se mélangent de façon harmonieuse.
La ville de Le Port a un patrimoine riche et singulier.
Depuis 1879 avec le chantier du chemin de fer et du creusement des bassins du port Ouest, des milliers d’ouvriers appelés les « pionniers du désert » ont forgé une ville, et donné une âme à la plaine désertique de la Rivière des Galets.
Ce vaste chantier durera sept ans et emploiera plus de 8000 personnes, des Réunionnais venant des quatre coins de l’île mais aussi des Indiens, des Malgaches, des Égyptiens, des « Somalis » … Ils s’installeront donc sur place dans des paillotes et des baraquements sommaires.
C'est tout naturellement que la ville voit fleurir sur son territoire au fil du temps : temples Malbar, malgache, mosquées, Ashram, églises, maison associative chinoises... Le Port terre d'accueil possède donc un patrimoine matériel et immatériel religieux riche à mettre en valeur.
Face à cette adversité, ces ancêtres Portois vont puiser leurs ressources dans leur foi, leurs religions, obligés de cohabiter ensemble malgré leur diversité culturelle et cultuelle. Cela a renforcé la construction d’une identité Portoise forte et fait naître un profond sentiment de communauté de destin.
Ce plus petit territoire de l’île, est une terre de croyances, il suffit pour s’en convaincre de déambuler dans le centre-ville et les quartiers avoisinants, les sentiers de la foi conduisent inéluctablement vers les églises et chapelles d’obédience catholiques, les mosquées, ashram, temples hindous, et autres spécificités Portoises comme une salle d’adoration où est exposé 24h sur 24 et 7jours sur 7 le Saint-Sacrément veillé jalousement par des adorateurs de l’église Sainte Jeanne D’Arc, un parc cultuel qui a vocation de lieu de culte et abrite plusieurs églises d’obédiences diverses (adventiste, catholique, mission et guérison), un Ashram qui est devenu un des lieux d'enseignements hindous locaux les plus actifs avec à sa tête le Swami Advayananda Sarasvati qui fait partie du Groupe de Dialogue Inter-religieux de La Réunion qui se rencontre régulièrement pour discuter des différents sujets communs aux différentes traditions.
Encore une spécificité locale dans notre démonstration du « vivre ensemble ». Ce parc cultuel (parc Jean XXIII) est encore un lieu à part qui est le symbole d’une île comme la nôtre où les nombreuses croyances peuvent se côtoyer sans heurts. Chacun pratique ses offices et ses prières en bonne intelligence avec le voisin.
Autre spécificité Portoise, la création de l’unique mosquée comorienne en terre française, communauté importante sur la commune.
Cette harmonie sociale est une caractéristique de notre « vivre ensemble » où ailleurs éclatent les conflits communautaires à travers l’histoire et l’actualité internationale, nous donnons une leçon au monde entier.
Au tan lontan, avant le début officiel de chaque campagne sucrière à Saint-Leu, il fallait procéder aux essais de broyage grandeur nature.
Par conséquent, quelques premiers camions de cannes étaient déversés dans les moulins pour les tester. Mais auparavant, quelque chose d’autre devait absolument être accompli : Un service religieux, cérémonie tamoule auquel aucun directeur d’usine n’aurait seulement songé à s’y opposer.
Il faut se souvenir que dès les débuts de l’industrie sucrière de La Réunion, les Indiens furent nombreux à y être attachés. Tous étaient alors parqués dans des camps ou calbanons. Déracinés, exploités au maximum, ils n’avaient pourtant ni renié, ni oublié leurs racines et la religion de leurs ancêtres.
Ouvertement ou discrètement, ils continuaient entre eux de vénérer et d’adorer leur divinités, différentes de celles que voulait leur opposer la religion officielle de l’époque. Puis, le temps ayant fait son œuvre, la tolérance, voire la reconnaissance de ces pratiques, apparurent. Ces Tamouls, que localement on appelait les Malabars, purent de nouveau pratiquer leur culte ancestral au grand jour.
Pour eux, aucune campagne sucrière ne pouvait se dérouler sans qu’au préalable soient faites aux divinités des offrandes, devant permettre d’éviter que des accidents graves, avec parfois morts d’hommes, se produisent pendant cette période.
C’est pourquoi, sur chaque propriété sucrière et à proximité des usines, se voyaient toujours des petits temples aux couleurs vives, soigneusement entretenues.
Le directeur de l’usine, les membres de sa famille, ainsi que d’autres principaux responsables, se devaient d’honorer cette manifestation de leur présence. Alors, et alors seulement, les moulins étaient mis en route et la campagne sucrière prenait sa vitesse de croisière.