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LES PERSONNALITÉS PORTOISES DE LA RÉUNION

LES PERSONNALITÉS PORTOISES REUNION 974
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23 février 2021

Nous connaissons tous la ville du Port pour son côté industriel et son port. Elle est une plateforme importante dans l’économie réunionnaise. Bon nombre de bateaux de marchandises mais aussi de croisière s'y arrête…

 

Cette commune atypique a abrité des personnalités riches en poèmes, histoires et de péripéties politiques. Petit retour sur trois d’entre elles qui font parties de l’âme portoise !

 

 

CHARLES RENAUDIÈRE DE VAUX – LE MÉDECIN SAUVEUR

 

À la fois médecin et maire, le Saint-Pierrois a marqué l'histoire du Port par son sacrifice !

Né à Saint-Pierre le 20 octobre 1874, Charles Renaudière de Vaux s'envole pour la métropole pour entreprendre des études de médecine. Il revient dans son île natale quelques années plus tard et s'installe à Saint-Louis.

 

En 1904, il décide de s'intéresser à la politique et se présente aux élections municipales de la commune de Saint-Louis. Celui-ci est élu maire de Saint-Louis à l'âge de trente ans, le 8 mai 1904.
Son élection est accueillie de façon triomphale ! Mais son contentieux avec un certain Aubry de Saint-Louis, le pharmacien, le déçoit et le pousse à demander son affectation au Port et à remettre sa démission de ses fonctions de maire au Gouverneur Paul Samary. Elle prendra effet le 11 janvier 1906.

 

C'est le 5 novembre 1905 qu'il sera nommé agent de la santé au Port par le chef de la colonie. Il sera le seul médecin du Port, de La Possession, et aussi du CPR (Chemin de Fer Port Réunion) ainsi que celui de la douane, puis responsable de l'asile des aliénés à Saint-Paul et du lazaret de La Grande Chaloupe.

Sa carrière de politicien n'étant pas bien loin, il est élu au conseil municipal de la ville du Port en 1912, puis en 1919 premier adjoint au maire et enfin maire du Port lorsque Georges Michel se retire pour cause de maladie en mai 1920.

 

Malheureusement en 1919, une épidémie de grippe espagnole touche La Réunion et donc la ville du Port. Pendant deux longues années, Renaudière de Vaux va aider sans compter les malades touchés par la maladie et ainsi sauver des vies.

Il fut lui aussi infecté par la maladie qui l'emporta en janvier 1921 à l'hôpital du Grand Ozoux à Saint-Denis. La grippe fit officiellement 7 451 morts à La Réunion.

La ville du Port, érigea le 10 novembre 1935 une statue à son nom. Elle se trouve au bout de la rue qui porte elle aussi aujourd'hui le nom de Charles Renaudière De Vaux.

 

 

 

LÉON DE LEPERVANCHE – SYNDICAT, MAIRE ET VENDEUR DE MANIOC

 

Ce que l'on peut retenir de cet homme humble, roturier, et vendeur de manioc c'est qu’il est un des pionniers du syndicalisme qu'a connu La Réunion.

Léon de Lepervanche est né le 21 novembre 1907 à Saint-Denis de La Réunion. Sa mère l'envoie faire ses études dans l'unique lycée de l'île, le lycée Leconte de Lisle à Saint-Denis.

En 1923, à l'âge de 16 ans, Léon arrête ses études pour entrer à la Compagnie du chemin de fer et port de La Réunion comme journalier, dans le but d'apporter sa contribution à l'édification d'un monde plus solidaire.

Pris par l'envie d'aider, il se joint aux militants engagés dans la lutte pour le respect des droits fondamentaux et contre les atteintes aux libertés. Il rejoint ceux qui prônent la paix ! Il devient un syndicaliste reconnu !

Le 28 novembre 1942 est une date importante dans l'histoire de Léon Lepervanche ! Il a été à la tête, avec ses amis fidèles, de la guérilla urbaine contre les troupes pétainistes basées au port et contraint le maire, Léon Coaquette, à la démission. Ce jour-là, le dernier foyer de résistance allié au torpilleur Le Léopard, bombarde la batterie du Port, et ce soir-là, La Réunion est libre !

Avec son ami Raymond Vergès, il fonde le Comité Républicain d'Action Démocratique et Sociale C.R.A.D.S le 11 mars 1945. Le 27 mai 1945, il est élu maire de la ville du Port une grande victoire pour lui mais aussi pour le C.R.A.D.S !

le 12 février 1946, Léon de Lépervanche et Raymond Vergès (père de Paul et Jacques Vergès) déposent un projet de loi en faveur de la départementalisation de La Réunion. Ils seront suivis par Aimé Césaire qui fera de même pour la Guadeloupe, Martinique et de La Guyane.

En 1946, La Réunion devient département français.

Léon de Lepervanche se représente une dernière fois aux élections municipales le 17 juin 1951, mais perdra cette dernière bataille. Il ne se représente pas en 1956, mais conserve ses mandats locaux jusqu'à sa mort le 14 novembre 1961.

Cet homme tourné vers la politique a marqué l'histoire du syndicat. Il a toujours été une personne humble, il se déplaçait toujours avec son petit vélo et vivait dans sa petite case créole dans le centre-ville du Port. Malheureusement ce mode de vie roturier ne plaisait pas à sa femme Paula, qui le quitta quelques années plus tard.

Après tous ses efforts et sa contribution dans tous les combats syndicales et politiques, il quitta ce monde épuisé en homme intègre.

 

 

 

EUGÈNE ROUSSE – POÈTE ET ÉCRIVAIN

 

La ville du Port sera à jamais marquée par la personnalité de deux auteurs qui participent à rendre positive l’image de la ville et faire connaitre son histoire : Patrice Treuthardt mais surtout Eugène Rousse décédé le 4 décembre 2019.

Eugène Rousse, professeur de sciences au collège, retraité, passionné par l'histoire locale, est sans doute le "chercheur du PCR" ayant le plus visité l'histoire politique du Port.

Dans « La commune du Port a cent ans » (Publication de la ville du Port, impr. Graphica, 2000,), série de trois ouvrages dont le récit débute le 14 août 1890 date de la création de la commune de La Possession,  Eugène ROUSSE propose une relation des faits politiques majeurs et leur connexion avec l'histoire de la ville. L’étude est d’un grand intérêt pour les détails qu’elle propose. (« Des marines au Port de la Pointe des Galets: 1886-1986: centenaire » (Océan Édition, Saint-André, 1987).)

 

L’ouvrage est entièrement consacré au port de la Pointe des Galets et constitue une des études les plus complètes et les plus récentes sur le sujet. Un article de Elie Fontaine y relate les étapes de la construction du port de la Pointe des Galets (les motivations, le contexte de la construction, le déroulement de cette dernière et les projets rivaux).
Un complément d’informations permettant de contextualiser l’histoire de la commune est offert par «L’île de La Réunion et les activités maritimes (XIXe ‑ XXe siècle)»

 

 

VOICI L'AUTOBIOGRAPHIE D'EUGÈNE ROUSSE QUE NOUS PARTAGEONS AVEC VOUS

 

"En cette année 2016, j’ai 88ans, après avoir consacré beaucoup de temps à la rédaction dizaine de biographies, j’estime que le moment est venu d’écrire brièvement la mienne.
Je suis né le 5 Mars 1928 à la maternité coloniale de Saint-Denis en face de la Cathédrale. Mon enfance et une partie de mon adolescence se sont écoulées à la Montagne où mon père exerçait la profession de facteur des PTT et ma mère celle de femme au foyer. Pour éduquer leurs neuf enfants, mes parents ont dû faire preuve de beaucoup de courage.
Au milieu des années 30, j’ai été scolarisé à Saint Bernard dans une école de garçons à classe unique dépourvue d’eau, de sanitaires, de clôture… puis à l ‘école mixte du Ruisseau Blanc, un peu mieux équipée.

Dans La Réunion coloniale, le dénuement était général. Enfants de petit fonctionnaire, mes frères et moi nous devions consacrer nos jeudis et nos dimanches aux corvées de bois, d’eau que nous allions puiser dans les ravines et aux travaux domestiques les plus divers. A cela, il faut ajouter la fréquentation des cours de catéchisme assurés par le père Raimbault en personne et la messe dominicale où nous nous rendions régulièrement en compagnie de nos parents.

En Septembre 1939, une page se tourne dans ma vie. Dès qu’éclate la Seconde Guerre Mondiale, mon père décide d’installer toute la famille en ville de Saint Denis. Je fréquente alors l’unique école publique de garçons du chef-lieu, l’École Centrale dont le directeur – un ancien combattant de la guerre 1914-1918 que j’ai vu pleurer lors de l’annonce de la capitulation de la France en juin 1940 - était un enseignant d’un extraordinaire dévouement.

Je lui dois ainsi qu’à deux de ses adjoints ma réussite au brevet élémentaire et au concours d’entrée à l’École normale qui m’ont permis d’envisager l’avenir avec sérénité.

En Octobre 1949, alors que les privations consécutives à la Guerre se font encore durement sentir à la Réunion, je me rends par voie maritime à Aix-en-Provence pour ma formation professionnelle. Le voyage d’une durée de quatre semaines fut pour moi un bonheur permanent. Je pouvais enfin me distraire, me reposer et disposer d’un confort auquel je n’étais pas habitué.

 

Mon séjour d’un an à Aix-en-Provence a été extrêmement agréable et enrichissant. Mes études m’ont laissé assez de loisirs pour parcourir toute la Provence, le nord de l’Italie, une partie de la Suisse et de l’Allemagne. J’ai pu découvrir Paris, l’Alsace et surtout la Bretagne où résidait un de mes oncles. A Paris, où je logeais à l’hôtel des étudiants réunionnais de la rue Saint Sulpice, j’ai eu le plaisir d’assister à des spectacles de qualité et de participer à des manifestations contre la guerre du Vietnam.

En Octobre 1950, ce n’est pas sans une certaine mélancolie que je regagnais la Réunion. Parti d’Orly à l’aube du 11 octobre, j’atterrissais à Gillot le 14 octobre à 22h, après des escales à Athènes, le Caire, Djibouti, Monbasa, Tananarive.
Le 23 octobre, je prenais mon poste d’instituteur au Port où s’est déroulée toute ma vie professionnelle.

Marié 15 mois plus tard à une institutrice venue de la Rivière Saint Louis faire des remplacements dans l’école où j’enseignais, j’étais en 1955 chef de famille de quatre enfants à qui je me suis efforcé de donner une solide éducation. Ce qui ne m’a pas empêché de m’impliquer fortement dans la vie associative de la cité maritime notamment dans la vie sportive, dans la vie syndicale, dans la vie politique et dans la vie municipale.

Dans ces milieux si divers, j’ai côtoyé des personnes comme Raymond Mondon et Léon de Lépervanche qui m’ont énormément appris. Certaines d’entre elles ont profondément marqué l’histoire de notre ile.

Début Mars 1983, j’ai fait valoir mes droits à la retraite. Une retraite que j’ai presque entièrement consacrée à servir ma famille et mes concitoyens.
Dans l’exercice de mon mandat de conseiller municipal du Port (1971-2008), je me suis employé à donner des raisons d’espérer à la frange de la population la plus démunie. J’ai surtout activement participé au combat visant à doter la cité maritime d’établissements scolaires bien équipés et en nombre suffisant, tout en veillant à ce que, hors temps scolaire, les jeunes aient la possibilité de s’occuper utilement et de s’épanouir pleinement. C’est une de mes plus grandes satisfactions d’élu.

Dans les diverses associations au sein desquelles j’ai milité, j’ai œuvré afin que les droits des Réunionnais soient respectés et que la société Réunionnaise soit plus solidaire et plus fraternelle. Pour atteindre ces objectifs, beaucoup reste à faire.

 

Un de mes soucis majeurs a été de donner à mes compatriotes la possibilité de s’approprier leur passé. Pour y parvenir, j’ai consacré beaucoup de temps à consulter des archives de toutes sortes tant locales que nationales, aussi bien publiques que privées tout en ne négligeant pas les archives orales dont la richesse est souvent insuffisamment exploitée. Les résultats de mes recherches ont fait l’objet de publications dans des ouvrages dont l’édition n’a été possible qu’avec l’aide notamment du Conseil Générale de la Réunion et de la Commune du Port.

J’ai en outre apporté ma contribution afin d’assurer l’enrichissement et la conservation du patrimoine biographique de la Réunion et j’ai publié de nombreux dossiers relatifs au grands événements qui ont marqué l’histoire de notre île au cours du siècles dernier.

Comment ne pas ajouter que je m’estime heureux d’être arrivé dans d’assez bonnes conditions jusqu’aux plus hautes marches de l’escalier de la vie. Une vie au cours de laquelle j’ai eu l’immense bonheur d’assister à une véritable métamorphose de la Réunion sur tous les plans. Une vie au cours de laquelle il m’a été possible de réaliser la plupart de mes projets."

Eugène Rousse